Championnat canadien 1940

Le 25/07/2021 0

Dans Tournois et trophées

Une première aux Employés civils: juillet 1940

Le club de tennis des Employés civils, installé depuis 1936 sous les murs devant le Parlement de Québec, a posé sa candidature pour l'organisation des championnats canadiens de 1940, les premiers tenus après l'entrée en guerre du Canada. L'événement, réalisé avec succès, inaugure une longue série de compétitions de tennis de haut niveau qui seront tenues par ce club au cours des vingt-cinq années suivantes.

On apprenait dans L'Action catholique du 17 avril 1940 que la Canadian Lawn Tennis Association (CLTA) devait prendre une décision concernant les championnats canadiens : l'Association des employés civils(1) avait proposé de tenir le tournoi de cette année-là à Québec.

Dix jours plus tard, la décision est rendue, l'Association canadienne s'est prononcée en faveur de Québec, pour les dates du 6 au 13 juillet. Il est à noter que, dans un vote tenu par correspondance, elle a justement décidé de maintenir l'événement malgré l'entrée en guerre du Canada l'automne précédent(2).

L'Association des employés civils commence aussitôt des réunions et met en place un comité d'organisation. Compte tenu de l'importance du tournoi, on prévoit améliorer l'éclairage de même que l'égouttement du terrain. Le dernier drainage, en effet, remontait à... 1903(3)

Les mœurs sont encore au « patronage » - dans le bons sens du terme. Le comité publie rapidement le nom de personnalités du monde politique qui donnent officiellement leur appui à la tenue de l'événement : le lieutenant-gouverneur Eugène Fiset, le premier ministre Adélard Godbout, le maire de la ville Lucien Borne(4).

Comité du championnat canadien

Le comité d'organisation du championnat canadien aux Employés civils (Photo L'Action catholique, 7 mai 1940)

Chalet AEC 1940

Le chalet du club des Employés civils (Photo L'Action catholique, 29 juin 1940)

Le tirage a lieu le 5 juillet et Paul Bédard, gérant des tournois et représentant de la CLTA, se déclare « enchanté du travail réalisé par le comité d'organisation ». L'événement est d'autant plus important pour la ville que ce championnat, habituellement tenu à Toronto, est présenté pour la première fois sur le territoire du Québec(5).

Les chroniqueurs sportifs y voient d'ailleurs une excellente occasion de publicité pour la capitale :

« Dès aujourd'hui, on va recevoir la visite des meilleures raquettes du pays pour l'ouverture de ces grandes compétitions où les championnats du Canada seront à l'enjeu.
C'est une excellente publicité pour Québec que ces grandes épreuves du court. Elles permettent à notre ville de faire parler d'elle quelque peu à l'étranger. Durant toute la semaine prochaine, les journaux du pays relateront les différentes phases des tournois et mettront Québec sur la carte du sport(6). »

La première phase du tournoi commence le 6 juillet, par une ronde d'élimination pour les joueurs des environs : vingt-quatre sont inscrits en simple masculin et seize en simple féminin. Parmi eux, Lauréat Cantin et Jean-Louis Létourneau, par exemple, ont à leur actif plusieurs championnats dans différentes compétitions régionales. Du côté féminin, Julienne Dugal, Margaret Brewer et Hélène Trudelle défendent les couleurs de la ville.

Joueurs de Québec, 1940

Quelques participants de la région de Québec au tounoi canadien (Photo L'Action catholique, 7 juillet 1940)

 

Joueuses au championnat 1940

Particpantes féminines au tournoi canadien (Photo L'Action catholique, 29 juin 1940)

Le tournoi principal commence le lundi 8 juillet avec au programme plus de soixante parties disputées. Compte tenu du nombre d'inscrits, les matches sont joués dans trois clubs de la ville : Employés civils, Voirie et Saint-Louis. On parle d’ailleurs « des » championnats puisqu'il y a en tout huit classes : simples masculin et féminin, doubles masculin et féminin, mixte, simples masculin et féminin junior et vétéran.

Il ne faut pas oublier que le tournoi canadien est ouvert aux joueurs de l'extérieur du pays. Cela entraîne des complications : des joueurs en provenance du Texas sont retenus à la frontière plusieurs heures jusqu'à ce que des membres du comité d'organisation interviennent auprès des autorités frontalières(7).

Outre ce problème, le déroulement du tournoi se poursuit sans anicroche, surtout pour le travail des journalistes qui rendent un hommage appuyé aux responsables : 

« Il faut admettre que l'organisation de la Canadian Lawn Tennis Association et des Employés civils est merveilleuse. On a compris que le succès d'une telle entreprise reposait pour une grosse part sur le travail des journalistes. En conséquence, on prépare avec beaucoup d'obligeance des rapports complets des joutes pour faciliter d'autant la besogne des scribes sportifs. Des tournois de cette envergure ne sont pas faciles à suivre si l'on ne peut compter sur la coopération des organisateurs. »

Reste maintenant à voir quelle sera la réaction du public. La presse ne peut qu'espérer :

« Jusqu'à aujourd'hui, on a permis au public l'accès gratuit à la galerie des différents courts. Il faudra verser un léger prix d'admission pour le reste de la semaine. Nous serions heureux avec les organisateurs si les fervents du tennis consentaient à se rendre nombreux pour les prochains jours de façon à ce que l'on couvre en partie les nombreuses dépenses du tournoi(8). »

Groupe de participants au tournoi canadien

Quelques participants et participantes au tournoi canadien (Photo L'Action catholique, 10 juillet 1940)

Le contingent de Québec va connaître quelques succès, surtout en double féminin (Julienne Dugal et Hélène Trudelle) et en mixte, mais à l'exception d'un participant en catégorie vétéran, personne ne va dépasser le stade des quarts-de-finale. Les grands honneurs vont aller à des inscrits de l'extérieur : le simple masculin revient à Don McDiarmid, d'Ottawa, qui vient au surplus de s'offrir le championnat de la province de Québec; le simple féminin est remporté par Eleanor Young qui, avec sa concitoyenne Jean Milne de Vancouver, gagne aussi le double féminin; le double masculin est l'affaire du duo Phil Pearson de Montréal et Ross Wilson de Toronto; le double mixte est enlevé par Milne/Pearson; en classe junior, le simple masculin est remporté par Jack Geller de la région de New York et le simple féminin par Claire Renshaw de Montréal. Enfin, pour sauver les honneurs de la ville, la catégorie vétéran est remportée par Alphonse Gingras, vieux routier du tennis à Québec(9).

Dans son ensemble, le tournoi aura été une réussite et le chroniqueur de L'Action peut y aller d'un bilan plus que positif :

« Il n'est pas exagéré de dire que les employés civils ont remporté un succès éclatant. C'est un résultat qui rejaillit sur tout Québec. Nous avons reçu au cours de la semaine dernière les sommités du monde du tennis et ces messieurs ont été enchantés de la façon dont le tournoi a été conduit. Point de retards ni de partialité, mais de l'exactitude, de la droiture, et un esprit sportif qu'il convient de souligner.

Les employés civils viennent d'écrire une page merveilleuse, une page claironnante dans le tennis canadien. Ce résultat, ils le doivent à leur esprit d'initiative. Les directeurs de la Canadian Lawn Tennis Association n'oublieront pas de sitôt, nous l'espérons, le bel effort déployé par Québec dans ce tournoi qui se termine aujourd'hui(10). »

Alphonse Gingras

(Photo L'Action catholique, 15 juillet 1940)

Le bilan de L'Action peut paraître triomphaliste mais, après l'événement, un témoignage du représentant de la CLTA lui donne en bonne partie raison. Paul Gélinas, qui a géré le tournoi au nom de l'association canadienne, fait parvenir quelques jours plus tard un message de remerciements à l'endroit de l'organisation québécoise :

« Le tournoi pour le championnat intermédiaire de la Province m'ayant appelé à Montréal, j'ai dû quitter Québec sans pouvoir saluer tous ceux qui m'ont aidé sans compter à faire des championnats de tennis canadiens un événement sportif de première importance dans les annales du tennis à Québec.

Voilà pourquoi je me sers de la presse pour remercier tous ceux qui ont si largement contribué au succès des championnats canadiens. J'adresse tout d'abord mes plus sincères remerciements à tous les directeurs du club des Employés civils entre autres MM. James O'Connel Maher, Albert Plouffe, J. Alb. Paquet, J.-Horace Dubé, Edgar Morin, Arthur Hébert et Alphonse Gingras dont le travail a rendu au gérant de tournoi la tâche deux fois plus facile.

Merci à la presse qui, en tout temps durant le tournoi, a consacré ses pages sportives en très grande partie au bénéfice des championnats de tennis canadiens.

Merci encore à tous ceux qui ont prêté leur concours comme arbitres, juges de ligne, etc. etc. et aussi à tous les amateurs de Québec qui sont venus témoigner leur encouragement aux nombreux joueurs qui ont pris part au tournoi.

Merci enfin à tous ceux que j'aurais pu oublier au cours de ces quelques lignes et avant de terminer je tiens à offrir de nouveau mes félicitations au champion du Canada chez les vétérans, Monsieur Alphonse Gingras, de Québec.

J'espère avoir le plaisir de retourner à Québec dans un avenir rapproché, et de renouveler connaissance avec les nombreux amis que j'ai eu le plaisir de rencontrer durant mon trop bref séjour dans votre charmante cité.

Au revoir donc, et encore une fois, merci à tous(11). »

Le club des Employés civils vient de donner une première preuve de ses capacités d'organisation pour un tournoi d'envergure. On verra dans les quelque vingt-cinq années suivantes qu'il ne s'agissait pas d'un feu de paille.

Notes

1. L'Association des sportive employés civils a été créée en 1926 pour encadrer la pratique sportive de ses 600 membres. La première année, on comptait quatre sports principaux : tennis, baseball, hockey et quilles. À partir de 1936, alors que le club s'est installé sur le site du Quebec Lawn Tennis Club devant le parlement, le « Club des employés civils » va devenir un endroit mythique pour le tennis à Québec jusqu'à sa disparition en 1970.

2. L'Action catholique (AC), samedi 27 avril 1940.

3. Voir AC, 4 et 7 mai 1940.

4. AC, 28 et 29 juin 1940.

5. AC, 5 juillet 1940.

6. AC, 6 juillet 1940.

7. AC, 8 juillet 1940.

8. AC, 9 juillet 1940.

9. AC, 15 juillet 1940.

10. AC, 13 juillet 1940.

11. AC, 22 juillet 1940.

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